Conseil communal du 14 mars 2022 : l'accueil des réfugiés ukrainiens

Jérôme Derochette et Jacques Gennen

(Extrait de notre compte rendu publié dans le N°13 du mensuel Les Nouvelles de Salm, avril 2022)

Avant d’entamer la séance, le bourgmestre propose d’observer une minute de silence en faveur du peuple ukrainien plongé brutalement dans la tourmente. Il souligne ensuite la solidarité des Salmiennes et des Salmiens et revient, au terme de la séance, davantage sur les initiatives salmiennes. « Nous avons d’abord tenté d’envoyer un appel aux familles comme demandé par le Fédéral. Il nous a été proposé un formulaire sur le site de notre commune. Sur base de cela, on pouvait remplir un autre formulaire. Ce document rempli, on est au courant des disponibilités salmiennes. 

(Dessin de Riad Sattouf)

On a actuellement une bonne trentaine de familles qui se sont manifestées pour accueillir des Ukrainiennes et des Ukrainiens. Différents contacts ont eu lieu. Le gouverneur nous a contactés pour dire qu’il organisait quatre bus qui allaient en Pologne chercher un certain nombre de personnes. Nous avons répondu positivement pour dire que nous pourrions accueillir une vingtaine de personnes. 

Nous avons également reçu la demande d’un groupement de personnes de Lierneux qui partaient avec un bus en Pologne pour rapatrier des familles ukrainiennes. On a aussi répondu positivement à cette demande et nous avons pris en charge cinq personnes. »

Le bourgmestre poursuit : « À côté de cela, il y a eu des initiatives privées que je salue vraiment car il y avait des urgences qu’il fallait rencontrer dans la mesure du possible. Des choses très positives se sont passées. Notre souci était de pouvoir coordonner les choses. On a pu répondre à toutes les demandes. 

Avec la cellule du plan d’urgence, on a mis en place une procédure pour accueillir des personnes au hall omnisport. On peut y héberger une trentaine de personnes en urgence, avant qu’elles ne soient prises en charge par les familles accueillantes. Il y a aussi la remise en fonctionnement du home de Provedroux. Il a fallu plusieurs jours pour résoudre certains problèmes et notamment remettre en ordre l’ascenseur. 

Le Ministre-Président wallon a organisé une visioconférence à destination des bourgmestres. 

Toutes les familles accueillies absolument passer par Bruxelles pour la mise en ordre des documents. Les bourgmestres ont proposé de déléguer cette mission aux communes, mais il y a eu un refus catégorique de l’Office des étrangers qui veut contrôler les données et avoir la copie du document d’identité des personnes afin de vérifier qu’il s’agit bien de familles ukrainiennes qui résident actuellement en Ukraine. Cela peut se comprendre. 

Les réfugiés reçoivent des cartes A valides jusqu’à mars 2023. Ils disposent ainsi d’une protection au niveau de la mutualité, peuvent travailler et avoir un compte en banque ou encore bénéficier du revenu d’intégration sociale. Derrière les démarches administratives, il y a évidemment les nombreuses souffrances. » 

Élie Deblire énumère ensuite les différentes difficultés rencontrées sur le terrain qui font qu’il faut rester prudent quand on donne des chiffres. Et de conclure : « Restons calmes et soyons disponibles si demain nous sommes contactés par le centre de crise car ça va arriver ; nous allons être sollicités. On parle de 200 à 250.000 arrivées en Belgique. Nous avons raison d’être en ordre de marche car nous serons mis à contribution et nous aurons bien besoin de toutes les bonnes volontés. » 

François Rion réagit à l’exposé du bourgmestre : « On est bien conscient des difficultés énoncées mais on a un peu l’impression que tout est organisé comme si des gens suivaient un cheminement au travers d’une organisation bien huilée, comme si tous les réfugiés ukrainiens venaient de Kiev et arrivaient à Bruxelles, et puis étaient répartis sur le territoire mais ça ne saurait pas fonctionner ainsi. Comme pour les inondations, on va avoir une série de réseaux qui vont mener leurs actions et ensuite il faudra essayer de les coordonner.

À la base, il y a déjà tout un tas d’initiatives qui naissent parce que les gens ont envie d’aider. Profitons de cette envie avant qu’elle ne retombe. Je pense qu’il faut conserver la fraîcheur de ces réseaux en travaillant avec eux de façon plus précise. 

J’ai cru comprendre que le hall des Doyards était prêt. “Le dispatching sera prêt demain”, m’a répondu le CPAS. Qu’est-ce que ça veut dire ? Il y a un échange d’informations qui ne se fait pas suffisamment. Ce sont des « noyaux » qui arrivent, des parents, des amis, … On sait aussi qu’il faudra organiser très vite un soutien psychologique pour les réfugiés et les familles qui accueillent. 

Il y a des choses à préparer ici chez nous. On a un tas de personnes ressources qu’il faut utiliser à plein régime. Ce serait utile de s’y référer. Elles ont pris des initiatives, rassemblons-les dans un groupe de travail, de communication et d’échange. 

Le chaos ne fait que commencer, les gens vont brusquement débarquer. On apprend des choses aujourd’hui, comme l’utilisation du hall. Il faut par ailleurs éviter la procédure ridicule d’envoyer les gens à Bruxelles : il faut que les communes soient aptes à la procédure d’enregistrement. 

Je plaide quoi qu’il en soit pour que vous élargissiez l’appel à fédérer les différents réseaux qui se créent et la communication. Par ailleurs, je pense qu’il faut créer des noyaux de réfugiés dans les villages ou quartiers et ne pas trop les diviser, les familles souhaitent rester ensemble. 

On doit aussi s’appuyer un peu plus sur les comités de village. Il faut créer un staff de crise élargi, plus que celui du CPAS ou des membres du Collège communal ou de votre bureau.  Il faut être plus participatif. »

Élie Deblire : « Je ne vous rejoins pas par rapport à ce commentaire. Il y a déjà un staff. Le dispatching des familles est organisé. Il faut se dire aussi que le flux massif arrive à Bruxelles : les gens veulent avoir leurs documents. Ensuite, ils sont en attente d’une décision. Je veux pouvoir répondre aux demandes du Fédéral.  Les gens arrivent aux Doyards et sont ensuite dispatchés. C’est vrai qu’ils veulent rester ensemble. Dans un deuxième temps, si on nous demande un effet supplémentaire, le home sera utilisé. » 

(NDLR, les réfugiés doivent effectivement passés impérativement par Bruxelles dans un certain délai. C’est ainsi qu’un car a emmené à Bruxelles des Ukrainiennes et Ukrainiens arrivés chez nous, quelques jours après la séance du conseil communal. Le chauffeur communal Pierre-Yves Sougné était accompagné de la Salmienne Galina Nefedova. Le Bourgmestre est parti de son côté à Bruxelles le même jour pour gérer les problèmes d’attente et de délais. Il était accompagné de la Salmienne Svetlana Logvynchuk. Galina et Svetlana, deux interprètes bien utiles ! Notons encore que l’ancien home de Provedroux sera un des centres de transit pour les réfugiés arrivant en province de Luxembourg)

François Rion persiste : « L’intérêt du réseau élargi, c’est qu’on peut aussi trouver des solutions de première urgence auxquelles vous n’avez sans doute pas pensé. » 

Élie Deblire : « Je suis ouvert à toutes les propositions, mais soyons organisés et pragmatiques ; il faut remplir le formulaire, c’est le plus facile, et derrière ça, il y a toute une équipe qui travaille. » 

François Rion : « Je pense que ce serait bien de mieux réfléchir aux personnes ressources. »

Élie Deblire : « Non, ce sera l’anarchie. Remplir le formulaire, c’est un passage obligé, Monsieur Rion. Je vous l’ai dit : on doit être organisé. » 

François Rion : « On a mis sur pied un réseau solidarité pour les sinistrés des inondations, qui a bien fonctionné. Je persiste à dire qu’il vaut mieux réfléchir à des personnes ressources sans nécessairement suivre uniquement les mesures du Fédéral. Au niveau de la communication, il faut être plus compréhensible :  dispatching, c’est quoi ? »

Élie Deblire : « Je ne suis pas responsable que ce terme ait été utilisé … »

François Rion : « Si vous voulez tout gérer, il faut aussi gérer la communication ! »

Hervé Midré précise que les mouvements de jeunesse sont aussi fort mobilisés. 

Catherine Désert : « Et qu’en est-il au niveau des écoles ? A-t-on déjà pris des contacts ? »

Élie Deblire : « Il faut qu’on prenne les dispositions, mais leur raisonnement actuel, c’est de penser qu’ils vont retourner ; ce n’est donc pas l’urgence actuellement. » 

Hervé Midré : « Je suis conseiller de l’action sociale. Nous accueillons de nombreuses personnes, on rouvre le hall omnisports, on le nettoie et le home est remis en route. On accueille les personnes dans les meilleures conditions. Nous avons même 8 traducteurs. Quand je vois ce que nous avons fait, je suis très fier d’être belge et salmien. Sur la commune, nous étions vraiment prêts. »