Conseil communal du 26 juin 2023 : Vivalia, polyclinique et MRS La Bouvière

(Jérôme Derochette et Jacques Gennen)

Ce compte rendu est paru dans le mensuel salmien les Nouvelles de Salm (n°29, août 2023).

Cette séance a été notamment l'occasion d'un nouveau débat sur l'Intercommunale Vivalia et la MRS La Bouvière de Vielsalm.

Intercommunale Vivalia, polyclinique, MRS La Bouvière

Le conseil communal doit approuver l’ordre du jour de l’assemblée générale. Le bourgmestre Élie Deblire en profite pour faire un tour d’horizon de l’Intercommunale : « Vivalia est une institution dont la Province du Luxembourg possède 50 % de l’actionnariat. C’est dire qu’elle suscite beaucoup de débats au sein de l’enceinte provinciale. Au niveau des chiffres, il faut dire qu’ils ont surpris l’ensemble des administrateurs. L’année 2022 est marquée par un boni de 5.277.000 € alors qu’elle ne se présentait pas sous les meilleurs auspices. »

Le bourgmestre passe en revue les différents secteurs sous la houlette de l’intercommunale.

Le secteur hospitalier est en boni de 5.120.000 €, celui de la personne âgée en boni de 1.283.000 €. Du côté de l’extra hospitalier, on constate un déficit de 225.000 €. Il en va de même pour l’aide médicale urgente qui enregistre un déficit de 900.000 €.

Il attire l’attention sur la situation plus spécifique de notre maison de repos. Il précise qu’on peut parler d’équilibre « puisque nous enregistrons une petite perte de 51.000 € ». Il précise que le taux d’occupation est de 97,88 % avant de poursuivre : « 2022 est aussi une année surprenante au niveau des résultats, car, comme vous le savez, Vivalia a connu une cyberattaque qui a laissé des traces, mais sans occasionner autant de dégâts financiers qu’on aurait pu le craindre.

Alors, vous vous demandez peut-être comment il est possible de s’en sortir.  Sur base d’un constat : il manque à Vivalia beaucoup d’infirmières et d’autres membres du personnel. Il y a donc moins de charges de personnel. Le personnel infirmier en fonction est à féliciter, car il assume ses missions malgré un tel manque d’effectifs. C’est important à signaler. » 

Élie Deblire prolonge son intervention : « 2022 est également une année exceptionnelle avec l’arrivée de son nouveau directeur, Monsieur Pascal Mertens. Précisons que la maison Vivalia, c’est 3.700 collaborateurs, 600 médecins, 40.000 admissions et 330.000 consultations. À Vielsalm, en particulier, on dénombre 4.494 consultations, ce qui représente une augmentation par rapport à 2021. »

Et l’avenir de notre polyclinique ?

Qu’en est-il, dans tout cela, de l’avenir de notre polyclinique qu’on désigne désormais par l’appellation « centre de santé de proximité » ? 

Le bourgmestre précise : « Son avenir n’est pas compromis aujourd’hui. Ce qui perturbe certains administrateurs, évidemment, c’est que les consultations ne débouchent pas assez souvent sur des hospitalisations au sein de Vivalia. La plupart des médecins viennent en effet de la région liégeoise et orientent leurs patients vers leurs hôpitaux. 

Cela étant, le budget réservé pour une nouvelle polyclinique existe toujours. Des plans ont d’ailleurs déjà été présentés au niveau du bureau exécutif de Vivalia : ça avance, sans doute pas assez vite, mais croyez bien que je fais le maximum, avec d’autres, pour que ce soit enfin une réalité chez nous. 

À la MRS La Bouvière, il y a aussi des pénuries de main-d’œuvre et chaque fois que nous nous voyons en comité d’accompagnement sous la présidence de Monsieur Gennen, c’est un de nos points de discussion. 

Des lits ont été fermés à Saint-Vith et on a accueilli à la MRS des patients germanophones en nombre. » 

Jacques Gennen réagit : « Vous avez été complet dans votre présentation. Il est vrai que pour notre MRS, on a toujours le même problème d’engagement de personnel, mais c’est la même chose dans d’autres institutions. 

Il est vrai aussi que des personnes germanophones ont été accueillies à la MRS parfois même au détriment de personnes de notre commune qui n’ont pas pu profiter d’une place, car malheureusement c’était complet. Cela explique aussi l’équilibre financier.

Pour ce qui est de la polyclinique, on espère voir ce nouveau centre de santé de proximité rapidement.

Certains administrateurs se désolent de voir peu de patients salmiens aller à Bastogne ou Marche. Cela fait tant d’années que je souligne que la patientèle salmienne ne va pas vers Bastogne, mais plutôt vers Saint-Vith, Verviers ou Liège. Et cela ne risque pas de changer dans l’état actuel des choses puisqu’on sait que Bastogne va mal et que la pénurie flagrante de personnel infirmier, mais aussi de spécialistes y sévit également.

On espère qu’avec Vivalia 2025 et le regroupement des services hospitaliers dans le nouvel hôpital d’Houdemont, cette pénurie pourrait diminuer, mais cela reste et restera une vraie problématique pour notre coin. »

Élie Deblire : « Le combat est effectivement le même pour tout le monde. »

François Rion : « On avait l’habitude de dire “on est représenté” chez Vivalia, donc on fait confiance à nos représentants, mais, si vous vous souvenez, on avait pris un peu de distance par rapport à ce raisonnement, car on constatait justement quelques difficultés à propos de Vivalia 2025 et d’un nouveau grand hôpital au milieu de nulle part. 

La dernière fois, on n’a donc pas voté pour l’implantation du nouvel hôpital centre-sud à Houdemont-Habay en raison notamment de problèmes de proximité et de mobilité. Quelques semaines plus tard, le fonctionnaire délégué de la Région wallonne refusait le permis d’urbanisme pour ces mêmes raisons : ça nous a rassurés. 

Il nous revient en l’occurrence d’autres infos que celles que vous donnez. La communication vers le personnel n’est pas bonne du tout. Est-ce lié au fait que Vivalia ne sait pas elle-même où elle va ? 

En ce qui concerne le problème de recrutement, on s’était insurgé, il y a un an ou deux, contre la création d’un poste de directeur stratégique avec un salaire important qu’on ne pourrait du coup pas donner au personnel infirmier dont on a pourtant besoin. Le salaire du personnel est insuffisant ; c’est ce que dénoncent notamment les infirmières. On va donc s’abstenir parce que Vivalia ne valorise sans doute pas comme il le faudrait le personnel, notamment infirmier. »

Élie Deblire répond à François Rion : « J’entends vos remarques, mais je n’ai pas parlé de la communication dans mon intervention et je n’ai donc pas dit qu’elle était bonne. En ce qui concerne l’attractivité, notre province fait plus que toutes les autres provinces. Il a encore été décidé de maintenir les chèques repas. Il faut rappeler que les barèmes votés au niveau du fédéral doivent être respectés. Il y a aussi la réforme IFIC de revalorisation des salaires et des conditions de travail. 

On fait beaucoup pour l’attractivité. Par contre, lier, comme vous le faites, Monsieur Rion, le salaire d’un directeur aux salaires de centaines d’infirmières, c’est quand même très court comme raisonnement ; ça ne va pas résoudre le problème. 

Des mesures fiscales ont été prises au niveau fédéral qui pouvaient inciter les infirmières françaises à quitter Vivalia, mais grâce à une bonne communication, on a pu en garder beaucoup. Mais le souci est bien la pénurie partout et le fait qu’il faut rendre ce métier le plus attractif possible. Il faut aussi regarder les décisions des autres niveaux de pouvoirs dont les décisions ne nous aident pas toujours. 

L’attractivité salariale du Grand-Duché de Luxembourg pour les infirmières est très importante et faire en sorte que nos infirmières aient le même salaire chez nous, c’est totalement illusoire. On constate par ailleurs que certaines infirmières qui y sont parties reviennent chez nous. 

Je respecte votre position. »

François Rion : « Si les infirmières qui sont allées au Luxembourg reviennent, c’est souvent pour une question de trajet et la création de ce grand hôpital ne va pas arranger les choses, car il sera loin de nous.

Il y a tout de même une petite chose quand même inquiétante qui mérite de réfléchir à cette espèce de concurrence avec les médecins de la région liégeoise qui essaient de retirer des clients – ce n’est pas un lapsus, je parle bien de clients - à Vivalia pour les ramener à Liège. Cette rhétorique commerciale est inquiétante dans le monde médical. »

Élie Deblire : « Moi, ça ne me heurte pas, à partir du moment où vous pratiquez votre médecine dans votre hôpital, vous faites l’opération dans l’hôpital où vous officiez avec votre équipe. C’est difficile de venir dans des salles d’opération avec un personnel inconnu. 

Ce qu’il faut, c’est que plus de médecins de Vivalia viennent faire des consultations à Vielsalm. Notre problème, c’est de parvenir à attirer des médecins chez nous. Je ne veux pas qu’on en déduise que des médecins viennent ici pour attirer des clients : je pense que leur objectif est de rendre service à la population. »

André Boulangé : « Si des médecins liégeois prennent des rendez-vous à Liège dans un hôpital pour une résonnance magnétique par exemple, les patients iront dans cet hôpital et pourront, si nécessaire, s’y faire opérer plus vite. »

Stéphanie Heyden : « A-t-on un peu de recul par rapport à la prime provinciale octroyée au personnel infirmier qui choisit de travailler chez Vivalia ? »

Élie Deblire : « Oui, on a eu une analyse en conseil provincial et on est persuadé d’avoir pu attirer 70 à 80 infirmières grâce à cette prime, mais c’est difficile à estimer, car les infirmières déclarent rarement qu’elles viennent pour la prime. »  

La situation à la MRS La Bouvière

Anne Klein revient sur la situation de La Bouvière : « On a dit que des lits ont été fermés à la MRS de Saint-Vith, car il y manque du personnel et ici, il y a un équilibre financier, c’est donc parce qu’on manque de personnel et que les charges sont moins élevées ? »

Élie Deblire : « Non, pour La Bouvière, l’équilibre financier n’est pas dû au fait que l’on manque de personnel. L’effectif du personnel est même légèrement supérieur aux normes d’encadrement. Par contre, il y a une perspective de départs à la retraite et là, ça va coincer, mais on ne fait pas du boni parce que l’on manque de personnel. On est juste sur la corde. »

Philippe Herman : « Peut-être, mais Vivalia pourrait engager plus de personnel, ce ne serait pas de trop ! »

Anne Klein poursuit : « La problématique, c’est la prise en charge des personnes âgées et je me dis qu’un autre axe sur lequel il faut jouer, c’est le maintien de la personne à domicile et les aides à mettre en place. Ici, on a déjà pas mal de choses. Je lisais l’autre jour que l’Intelligence artificielle permettrait des maintiens à domicile, car elle préviendrait les chutes, rappellerait à la personne âgée quand manger, etc. » 

Élie Deblire : « Tant mieux si l’Intelligence artificielle peut améliorer la situation, mais la problématique, pour les infirmières à domicile, c’est qu’on est aussi sur la corde raide. »

Jacques Gennen : « C’est évidemment une problématique qui m’intéresse beaucoup comme président de la CSD, la Centrale de Services à Domicile. Le discours de certains responsables est bien de favoriser le maintien à domicile. Mais, quelles que soient les avancées de l’Intelligence artificielle, ce qu’il manque, ce sont des personnes physiques, du personnel soignant, pour accompagner ces maintiens à domicile. 

Quand j’entends certains responsables de Vivalia dire qu’il faut favoriser le maintien à domicile, ce qui leur permet d’ailleurs d’écourter les séjours, je veux bien dire oui, mais avec quel personnel pour les soins à domicile ? C’est ça, le problème. Il faut toujours veiller à un équilibre entre l’hôpital ou la maison de repos et le maintien à domicile, ce n’est pas évident du tout. »

Anne Klein : « En Flandre, il y a une prime aux aidants proches permettant de soigner leur parenté à domicile ; donc je me dis qu’il faut investiguer différents secteurs. » 

Hervé Midré intervient : « Sur papier, il y a sans doute assez d’effectifs, mais j’y ai été dernièrement. Je suis rentré dedans encore mieux que dans une église, car maintenant on les ferme. Il n’y avait personne. J’ai trouvé la personne que je devais aller prendre et qui voulait de l’eau. Personne n’était là, en pleine canicule. Il y a quand même un problème. »

Philippe Herman ajoute : « Il y a 2 personnes pour 129 lits, la nuit, c’est trop peu. »

Élie Deblire : « Il serait effectivement déraisonnable d’avoir quelqu’un en permanence à l’entrée. On peut effectivement entrer pour visiter les personnes jusqu’à 20 h. À partir de 22 h, il reste deux personnes. »

Philippe Herman le corrige : « À partir de 20 h 45. »

Élie Deblire rétorque : « C’est possible, mais je vérifierai. Les nuits, c’est ainsi ; certaines sont plus calmes, d’autres plus agitées. Statistiquement, sur la base du nombre d’appels la nuit, il est démontré que c’est suffisant. »

(NDLR, renseignements pris auprès de la directrice Julie Cornil au moment de rédiger ce compte rendu, de 20 h 45 à 21 h, le personnel soignant de l’après-midi et le personnel de la nuit font le point ensemble. C’est à partir de 21 h et jusque 7 h, qu’il y a deux membres du personnel soignant pour la nuit.)

Jacques Gennen réagit : « Je suis évidemment attentif aux remarques à propos des effectifs. Idéalement, quand je vois la situation de l’intérieur, je suis pour qu’il y ait plus d’effectifs ; c’est sûr, ça ne peut que faire du bien. Mais c’est vrai que ces dernières années, Vivalia a quand même augmenté le nombre d’effectifs. 

Évidemment, pour certaines plages horaires comme la nuit, j’estime que ce n’est pas suffisant ; ça ne veut pas nécessairement dire que les personnes sont mal prises en charge, mais il y a encore des efforts à faire. »

André Boulangé : « Oui, mais quand elles ne sont que deux, ça ne doit quand même pas être évident d’accompagner des personnes âgées qui, pour certaines, sont en fin de vie et nécessitent une grande attention. »

François Rion : « Il y a en tout cas une réponse qu’on ne doit plus jamais entendre : “les normes sont respectées”. On ne doit pas se baser là-dessus car comme il y a moins de personnel disponible, on aurait très vite tendance à diminuer encore ces normes. 

Plus on les diminue, plus elles seront faciles à respecter. Il faut donc continuer à dire qu’on doit trouver du personnel, tant qu’on le trouve, et ne pas s’enfermer dans le cercle vicieux du manque de personnel qui mène à une réévaluation des normes à la baisse. »

Élie Deblire : « Je n’ai jamais entendu dire que les normes avaient diminué et certainement pas en mettant en lumière le manque de personnel. Les normes nous sont rappelées et on nous dit que nous sommes au-dessus. Quand on réclame du personnel, on nous chante toujours la même chanson. »

Et François Rion de conclure : « On n’est pas obligé de se contenter des réponses qu’on nous donne. » 

Au vote, à l’exception des deux mandataires écolos présents qui s’abstiennent, c’est oui pour l’approbation de l’ordre du jour de l’assemblée générale de Vivalia.