Conseil communal du 24 août 2020 (1re partie)

Jacques Gennen et Jérôme Derochette

Voici le compte rendu tel qu'il a été publié dans l'Annonce de Vielsalm.

C’est une séance « de rentrée » avec un ordre du jour assez chargé. Nous commencerons ce compte rendu par quelques points (la création d’une maison médicale, la situation à la MRS et le port du masque) qui ont été abordés dans les divers et qui font polémique.

Création d’une maison médicale et fourniture des médicaments à la MRS La Bouvière

C’est André Boulangé qui, une fois de plus, lance le débat.

Il intervient d’abord à propos du projet de création d’une nouvelle polyclinique à proximité de la MRS La Bouvière. Il y verrait bien l’installation d’une maison médicale permettant d’accueillir de jeunes médecins accompagnés par les plus anciens.

(NDLR. Il ne s’agit donc pas de créer une maison médicale au sens réglementaire du terme avec une équipe pluridisciplinaire (comprenant un accueil et au moins un personnel infirmier, un travailleur social, un kinésithérapeute et des médecins et éventuellement d’autres représentants de professions paramédicales) dans le but de dispenser des soins de première ligne de qualité, accessibles, continus, globaux et intégrés.  Ce type de maison médicale s’adresse à l’ensemble de la population. Son action vise une approche globale de la santé considérée dans ses dimensions physiques, mais aussi psychiques et sociales.

Elle s’inscrit dans une approche de promotion de la santé et intègre des soins de prévention. Elle s’appuie sur une dynamique de participation communautaire pour favoriser une prise de conscience critique des citoyens vis-à-vis de mécanismes qui entravent leur santé.

Ce n’est donc pas d’une telle maison médicale dont il s’agit depuis qu’on en débat en séance du conseil communal.)

(L'hélico du Centre Médical Héliporté de Bra-sur-Lienne devant la MRS. Photo CMH)

La priorité pour André Boulangé, c’est de favoriser l’accueil de jeunes médecins pouvant s’appuyer sur l’expérience des anciens et assurer la relève. Il profite de son intervention pour relever que ces dernières semaines, quatre ou cinq médecins ont pris leurs vacances en même temps, ce qui a compliqué l’accès aux soins pour certains Salmiens.

Le bourgmestre Élie Deblire : « Un auteur de projet a été désigné par Vivalia en vue de monter un dossier portant sur l’installation d’une nouvelle polyclinique. 

Jacques Gennen et moi-même y sommes attentifs et nous avons relevé tout l’intérêt d’avoir dans la nouvelle polyclinique des locaux à la disposition de jeunes médecins avec la possibilité pour les plus anciens d’y organiser eux-mêmes certaines consultations et d’accompagner les plus jeunes. Nous participerons prochainement à une nouvelle réunion avec les médecins et les responsables de Vivalia. »

François Rion : « Le projet est-il vraiment de réaliser une grande polyclinique et une maison de santé dans laquelle les médecins locaux pourraient prester ? »

Élie Deblire : « Pour l’instant, je ne peux pas vous le garantir. Je ne peux pas promettre des choses dont je n’ai pas la maîtrise. Les médecins souhaitent continuer à travailler dans leur cabinet actuel. Je répète qu’il va y avoir une réunion avec les médecins et que nous allons tenter de discuter avec eux, l’architecte et les décideurs de Vivalia. »

François Rion : « Cela fait déjà longtemps qu’on en parle et cela devient urgent, au vu de l’âge de nos médecins… »

Élie Deblire : « Ce sont des dossiers qui ne sont pas prioritaires au niveau de Vivalia si on les compare aux gros dossiers d’infrastructure comme l’agrandissement de l’hôpital de Marche et le nouvel hôpital à Houdemont. Il faut aussi que les médecins veuillent s’impliquer. »

Il sera encore question de la maison médicale dans la suite des débats, mais on en vient à la question de la fourniture des médicaments à la MRS.

La fourniture des médicaments à la MRS

Pour rappel, c’est une pharmacie de Wellin qui a été désignée par Vivalia à la suite d’un marché public portant sur la fourniture des médicaments en doses unitaires individuelles aux résidents et résidentes de la MRS, un marché public qui n’a malheureusement pas été emporté par deux pharmacies locales qui fournissaient les médicaments auparavant.

(Une vue partielle du conseil communal. À gauche, André Boulangé s'adresse au bourgmestre...)

André Boulangé revient à la charge à propos de ce dossier : « J’ai eu des contacts avec plusieurs infirmières. Cette nouvelle organisation entraîne un surcroît de travail. C’est du temps en moins pour les résidents. 

L’utilisation par la nouvelle pharmacie d’un robot pour le tri des médicaments les oblige à ouvrir chaque jour 500 sachets de médicaments et des problèmes surviennent lorsque les médicaments doivent être scindés. Ils arrivent plus tard qu’auparavant et cela complique également l’organisation du travail. Les patients qui rentrent de clinique n’ont pas leur traitement. De plus, si un médicament manque, on téléphone à la pharmacie et c’est un répondeur qui vous accueille ! »

Interpellant directement Élie Deblire, il ajoute : « Vous avez approuvé la procédure de Vivalia ! »

Élie Deblire : « À ce jour, je n’ai pas entendu de commentaire particulier à ce sujet de la part du personnel. Je rappelle la régularité et la légalité du marché public organisé par Vivalia. Les pharmaciens locaux ont participé à ce marché. La robotisation du tri des médicaments était une exigence du cahier des charges pour diminuer le risque d’erreurs. »

André Boulangé : « Des infirmières m’ont fait part de leur ressenti. Elles estiment que c’était plus facile en travaillant avec les pharmacies locales. Mais les amis de mes amis… Ce n’est pas par rapport à vous que je dis cela, mais on arrange les choses… »

Élie Deblire : « Je ne peux pas tolérer vos propos ! Je fais partie du Conseil d’Administration de Vivalia et je n’ai pas entendu des propos critiques de la part du personnel infirmier.

Nous en avons également parlé lors du dernier comité d’accompagnement. La directrice de la MRS ne nous a pas fait part de critiques particulières et nous lui avons demandé un rapport d’évaluation tout en l’invitant à veiller à ce que le cahier des charges soit scrupuleusement respecté. »

François Rion : « C’est la proximité qui est recherchée dans tous les domaines et on continue à s’en éloigner. C’est la même chose pour la cuisine organisée au départ de Bertrix ! Quant à la polyclinique, je doute de sa réalisation pour les mêmes motifs ! » 

André Boulangé fait référence aux exemples qui existent dans d’autres communes comme Manhay et ajoute : « Les médecins continueront à travailler dans leur cabinet, mais pourraient avoir des consultations dans la maison médicale et accompagner ainsi les jeunes médecins qui souhaitent travailler ensemble. »

François Rion : « La solution technique n’est donc pas aboutie. Si Vivalia ne s’en occupe pas, il faut trouver une autre solution. »

Élie Deblire : « Le problème du financement est important. Si la Commune doit investir, on prendra nos responsabilités. » 

Catherine Désert approuve les propos d’André Boulangé concernant en particulier la fourniture de médicaments et les difficultés rencontrées. Elle précise qu’il est dommage d’avoir privilégié dans le cahier des charges du marché l’obligation de travailler avec un robot pour le tri des médicaments plutôt que retenir la proximité.

La MRS, son personnel et la place de la personne âgée dans la société

Jacques Gennen : « Je veux d’abord revenir sur l’intervention assez critique d’André Boulangé vis-à-vis de la MRS La Bouvière, lors d’une précédente séance du conseil. Je ne l’ai pas suivi car, comme président du comité d’accompagnement de la MRS, il me semblait prioritaire de soutenir le personnel qui a vécu des conditions de travail difficiles.

 

C’est un personnel qui est dans sa grande majorité dévoué et digne de confiance. Bien entendu, l’un ou l’autre ne sont pas à la hauteur, c’est vrai et cet après-midi encore, nous recevions, le bourgmestre, la directrice, l’infirmière en chef et moi-même, des enfants mécontents, à certains égards, de l’accompagnement de leur maman.

Cela a permis de mettre certaines choses au point car tout ne peut pas être parfait dans une telle institution et il y a toujours moyen de faire mieux.

À propos du personnel de soins, je veux aussi souligner la difficulté d’engager. La directrice passe des heures et des heures à organiser les remplacements. À l’heure actuelle par exemple, il manque un temps plein dans le personnel infirmier et c’est une société spécialisée qui va sans doute trouver une infirmière en Italie !

Quant à la problématique des médicaments, je regrette que les pharmaciens de Vielsalm n’aient pas obtenu le marché de livraison tout en relevant, comme le bourgmestre, la légalité de ce marché, dans l’état actuel des choses. »

Mais Jacques Gennen n’en reste pas là : « Enfin, je dois bien vous dire aussi que j’en ai marre d’entendre certains responsables de Vivalia parler de réduction du personnel à la MRS et revenir sans cesse avec le fait que les effectifs y sont bien au-delà des normes imposées par l’INAMI, marre aussi d’entendre toujours parler d’équilibre budgétaire.

Et que se serait-il passé si les effectifs avaient été moins nombreux à la veille de la crise sanitaire ?

Eh oui, j’ai l’impression que les personnes âgées, très âgées sont des citoyens de seconde zone aux yeux de certains. D’autres, heureusement, ont pu se saisir de la crise sanitaire et des erreurs commises aux différents niveaux de pouvoir pour rappeler que ce sont des êtres humains comme nous, comme les jeunes, ni plus ni moins, et qui ont leur place dans la société, avec les mêmes droits. »

À propos du port du masque 

Les conseillères écolos Catherine Désert et Anne Wanet interpellent le bourgmestre : est-ce encore bien nécessaire de porter le masque en rue alors que la saison estivale et touristique est terminée ? Anne Wanet de préciser : « J’habite dans la rue principale et je n’y croise quasiment personne et pourtant, je dois mettre le masque. À part le porter à la sortie des écoles, j’ai des doutes pour le reste. »

Élie Deblire : « J’ai pris la décision sur l’obligation de porter le masque après concertation avec les bourgmestres, le gouverneur, la Région wallonne et la police. Il faut avancer prudemment. J’attends la prochaine réunion du Conseil National de Sécurité. Je suis un bon soldat. J’attends les instructions. La Commune a géré cette crise de manière exemplaire. J’ai enregistré peu de critiques à ce sujet. »

Anne Wanet : « Oui, mais une ville n’est pas l’autre ! »

Une fois n’est pas coutume, André Boulangé est d’accord avec le bourgmestre : « Je porte le masque toute la journée dans mes contacts avec mes patients. De plus, nous sommes à l’entrée de l’hiver et on ne sait pas ce qui va se passer. Il y aura la grippe… Encore faut-il que le masque soit bien porté, changé ou lavé ! »

François Rion : « C’est un sujet difficile. Il y a des avis scientifiques contradictoires. Il y a un élément qui pointe de plus en plus le bout de son nez dans une partie de la population, c’est la crainte d’une pérennisation de systèmes de protection vis-à-vis d’autrui car les décideurs politiques et les scientifiques cherchent à se couvrir. 

Il y a une inquiétude devant des mesures de contraintes qui vont perdurer. Les experts ne se mettent pas d’accord, les politiques non plus. C’est une situation qui commence à modifier notre société. Ce sont des éléments à prendre en compte. »

Élie Deblire : « Ma référence reste le Conseil National de Sécurité composé d’experts choisis dans tout le pays. Suivre ce que décide le Conseil National de Sécurité est une bonne chose. Porter le masque reste important dans la tête des habitants. La police a été compréhensive dans ses interventions à ce sujet sauf pour certains groupes de touristes qui en prenaient trop à leur aise. »

Il est encore question de l’impact négatif du masque sur les contacts sociaux, ce qui fait réagir Élie Deblire : « J’y suis sensible, mais ne me qualifiez pas de bourgmestre sectaire ! Que certaines personnes soient incommodées, c’est vrai. Dans ce cas, elles peuvent être couvertes par un certificat médical.  Je rappelle que le port du masque est une mesure bien ancrée dans la tête des habitants. »

François Rion : « On ne vous a pas traité de bourgmestre sectaire. On vous a laissé bien tranquille jusqu’à présent. Ne nous faites pas dire ce que l’on n’a pas dit ! »

Jacques Gennen : « Je pense que la position prudente du bourgmestre est la bonne, mais je ne peux m’empêcher de rejoindre François Rion lorsqu’il évoque certaines mesures contraignantes et réductrices de nos libertés qui risqueraient de perdurer sans motif. La Ligue des droits humains a encore fait part récemment de ses préoccupations à ce sujet.

Quant aux experts et aux politiques, les avis sont partis dans tous les sens. Le ministre fédéral David Clarinval a même été jusqu’à dire « qu’on a capitulé devant les règles plus sévères prônées par les experts ». On se demande ce qu’il fait encore au gouvernement fédéral. »

Anne Wanet revient à la charge : « Je ne remets pas en cause certaines règles, mais il faut pouvoir les adapter d’une commune à l’autre et ce n’est pas aberrant de ne pas porter le masque à l’extérieur quand la distance de sécurité est respectée. »

Élie Deblire : « Si vous croisez quelqu’un et que vous discutez ensemble sans masque, vous ne respecterez pas les mesures de sécurité. »

Anne Wanet y va d’une dernière intervention : « L’obligation pourrait être d’avoir un masque sur soi et de le mettre quand une rencontre a lieu ou dans les endroits fermés. »

Thibault Willem : « Le port du masque est une mesure simple qui a permis d’organiser des événements dans la Commune en toute sécurité. Le port du masque n’a jamais tué personne mais au contraire, il protège ! »

François Rion : « Mes collègues écolos et moi-même ne voulons pas partir en guerre contre le masque. Mais nous sommes proches des citoyens et nous pouvons faire remonter le ressenti de certains d’entre eux vers des décideurs qui, de surcroît, habitent à Bruxelles, Anvers ou Namur. »

Thibault Willem : « Et qui sont aussi des médecins spécialistes ! »

François Rion : « Les experts sont des médecins, mais nous, nous parlons aussi social et relations sociales. »

On en reste là après cette dernière intervention.

La suite au prochain numéro.